• GRAND MARCHE TRANSATLANTIQUE

    GRAND MARCHE TRANSATLANTIQUE

  • Communiqué du Parti de gauche

    Vendredi 23 Mai 2014

    François Cocq, secrétaire général du Parti de Gauche

    Jeudi 22 mai, à l’Assemblée nationale, les masques sont tombés. Le groupe socialiste et le gouvernement ont fait le choix d’adopter une coquille vide en guise de résolution européenne sur le projet d’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et les Etats-Unis.

    Ce texte adopté est une forfaiture. Détournant l’initiative des parlementaires Front de Gauche, les socialistes ont vidé le texte initial de tout contenu contraignant.

    Exit la suspension des négociations, dehors la suppression des tribunaux d’arbitrages entre états et investisseurs, la ministre Fleur Pellerin reconnaissant pourtant en séance que ce sont des « mécanismes qui servent à protéger les entreprises ». Quant à la ratification du traité par le Parlement français, la ministre s’est contentée de faire inscrire qu’il s’agit d’un accord mixte pour ne pas avoir à écrire noir sur blanc que le Parlement national devrait se prononcer en dernier ressort !

    Le gouvernement et les siens sont des faussaires. Ils couvrent leur soumission à l’Union Européenne et au règne du marché roi par des salmigondis de surface pour tromper le peuple qui est appelé aux urnes.

    Et pendant qu’ils dépouillent le peuple de sa souveraineté, le FN fait le guet. Marion Maréchal Le Pen, en sentinelle du système, s’est ainsi abstenue au moment du vote.

    Pour faire barrage au projet d’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, dimanche 25, un seul vote : le vote Front de Gauche

     

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  •  Nous vous annoncions ici dans un article repris de Politis le 21 mai, qu'un débat sur le GMT (ou TAFTA) allait pouvoir se tenir  jeudi 22 mai à l'Assemblée Nationale à l'initiative du groupe Front de Gauche.

    Voici comment la discussion a tourné sous l'impulsion des députés socialistes...

    Sur Médiapart

    | Par Lénaïg Bredoux

    À l’occasion d’un débat à l’Assemblée nationale, les socialistes ont détricoté une résolution du Front de gauche, soutenue par les écologistes, demandant la suspension des négociations sur l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis.

       

    Le débat en est devenu surréaliste. Jeudi, les députés ont examiné une résolution du groupe Front de gauche à l’Assemblée nationale demandant la suspension des négociations sur le projet de traité de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis. Sauf que le PS a complètement dénaturé le texte, plutôt que de s’y opposer à trois jours des élections européennes.

      

    « Le groupe Front de gauche s’est vu contraint de voter contre son propre texte. » La première phrase du communiqué des députés communistes et apparentés résume l’absurdité de ce qui s’est joué dans l’hémicycle jeudi après-midi. En résumé : le Front de gauche dispose chaque année d’une niche parlementaire au cours de laquelle il peut soumettre des textes au vote. Cette fois, il a choisi une résolution demandant la suspension des négociations sur l’accord de libre-échange avec les États-Unis (appelé TTIP ou TAFTA). Une position partagée par les écologistes, par une poignée d’élus de droite et par la députée FN Marion Maréchal-Le Pen.

    Mais à trois jours des européennes, le PS n’a pas voulu s’opposer frontalement au texte. Il a donc choisi de multiplier les amendements pour le détricoter : exit la demande de suspension des négociations, pourtant au cœur de la résolution, ou l’exigence de retirer le mécanisme de règlement des différends, vivement contesté par les opposants au Traité (lire notre article sur le piège caché).

    En commission la semaine dernière, les échanges avaient été surréalistes : la députée PS Estelle Grelier, tout sourire, avait ainsi fait adopter un « amendement dur », selon son expression, pour remplacer la suspension des négociations par « l’exercice d’une grande vigilance ». Commentaire impuissant d’André Chassaigne, député PCF en charge du texte : « Notre proposition de résolution sera un couteau sans lame qui aura perdu son manche. »

    Jeudi, rebelote, dans l’hémicycle, où le PS dispose de la majorité, même si bien peu de députés ont assisté aux débats. Le Front de gauche et Europe Écologie-Les Verts (ici ou par exemple) ont bien déposé des amendements pour revenir au texte initial. En vain. La résolution se contente pour l’essentiel d’en appeler à davantage de transparence dans les négociations.

    Finalement, le Front de gauche a voté contre : « Les députés socialistes ont préféré dénaturer notre texte, car ils n’assumaient pas de voter une dénonciation de la dérive libérale et atlantiste du gouvernement. » Et les écologistes ont refusé de prendre part au vote, dénonçant une « mascarade » (voir en vidéo l’intervention du député EELV Jean-Louis Roumegas).

    Depuis plusieurs mois, les socialistes font assaut d’ambiguïtés et multiplient les déclarations contradictoires sur le traité de libre-échange en cours de négociations. L’an dernier, les militants du PS avaient majoritairement voté pour la suspension des discussions – c’était dans le cadre de la convention Europe, sous forme d’un amendement (le n° 10), déposé par l’aile gauche du parti. Mais ces votes avaient fait l’objet d’un psychodrame incompréhensible, comme le PS en a le secret.

    À l’inverse, en mai 2013, au diapason du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, les eurodéputés socialistes français avaient soutenu le mandat donné à la Commission européenne pour mener les négociations. À l’exception de trois élus de l’aile gauche Liêm Hoang-Ngoc, Françoise Castex et Isabelle Thomas qui avaient voté contre. Sauf que jeudi, à l’Assemblée, l’aile gauche du PS a fait profil bas : hormis une intervention à la tribune de la députée Nathalie Chabanne, qui s’est dite favorable à un référendum, aucun député de son courant n’a voté les amendements du Front de gauche.

    Globalement, le PS s’est convaincu qu’un tel traité pourrait avoir des avantages pour la France, en relançant la croissance européenne, et qu’il valait mieux négocier que de s’opposer par principe.

    Mais à l’approche du vote des européennes, les socialistes ont pris peur, inquiets de voir se reproduire le « syndrome du plombier polonais de 2005 », selon l’expression d’une ministre du gouvernement. En meeting, ils multiplient les critiques, jurent qu’ils seront très vigilants et soulignent que de telles négociations pourraient durer bien longtemps. Il faut « dédramatiser », insiste la secrétaire d’État au commerce extérieur Fleur Pellerin.

    Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture et porte-parole du gouvernement, le dit au détour d’une conversation en listant toutes les raisons pour lesquelles un tel traité est encore bien incertain : « Aux États-Unis, Barack Obama n’a pas de majorité. D’autant moins qu’il risque de perdre les mid-terms. Par ailleurs, l’accès aux marchés publics américains est une contrepartie indispensable. Or l’État fédéral américain renvoie vers les États. Tout cela peut durer des années. »

    Les chefs de file PS aux européennes se sont même fendus d’une tribune dans Le Monde pour prendre leurs distances avec les négociations en rappelant leur attachement au « juste échange ». Ils promettent également qu’ils refuseront le fameux mécanisme de règlement des différends, qui doit permettre à une entreprise privée de faire condamner un État par un tribunal de droit privé. Mais sans rappeler que la France n’a pas exigé qu’il soit exclu du mandat de négociations !

    Sur le plateau de Mediapart, face à Jean-Luc Mélenchon (PG) et Emmanuelle Cosse (EELV), tous deux opposés au TTIP, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis avait aussi lâché : « Pour l’instant, c’est non. Parce qu’on ne dit pas “oui” à quelque chose qu’on ne connaît pas. » Puis : « Ce qui nous revient (des négociations tenues secrètes, ndlr), ce n’est pas acceptable. »

    Sauf qu’en février, lors d’une visite aux États-Unis, François Hollande avait dit tout le contraire : « Aller vite n'est pas un problème, c'est une solution. Nous avons tout à gagner à aller vite. Sinon, nous savons bien qu'il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de crispations. »

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  • Sur Politis.fr - 21 mai 2014

    Les candidats socialistes refusent de se prononcer avant la fin des négociations UE-USA. Mais affirment dans une tribune que leur vote sera conditionné au respect de six « exigences ».

    L’irruption dans la campagne européenne du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, connu sous les sigles TAFTA, TTIP ou GMT (pour Grand marché transatlantique), embarrasse les socialistes. Le Front de gauche, qui dénonce ce projet depuis cinq ans et demande l’arrêt immédiat des négociations, en a fait un de ses chevaux de bataille ; ses candidats s’engagent à rejeter l’accord au terme des négociations. Europe écologie-Les Verts dénonce également ce futur accord de libre-échange, depuis que, l’été dernier les eurodéputés Verts ont opéré un virage sur l’aile ; auparavant et jusqu’en 2010 au moins ils avaient voté plusieurs résolutions réclamant la réalisation « d’ici à 2015 (…) d’un marché transatlantique ». Jamais en retard pour s’accrocher à une cause qu’elle juge porteuse, Marine Le Pen a déclaré « la guerre » à ce traité, sans prévenir tous ses conseillers régionaux, dont les votes en Paca, en Rhône-Alpes ou en Picardie, ne manifestent aucune hostilité à ce projet.

    En quelques jours, ce traité en cours de négociation est ainsi devenu « un épouvantail dans la campagne », selon l’expression empreinte de neutralité du Monde. Toutes les listes en présence sont désormais sommées de se positionner. Le 22 mai, l’Assemblée nationale débat d’une résolution proposée par les députés du Front de gauche. Le PS s’est empressé de la caviarder en commission, mais ne pourra éviter un vote en séance, révélateur des positions de chacun.

    L’urgence d’attendre

    Soucieux de déminer le terrain, les têtes de liste (hommes et femmes) du PS aux élections européennes dans les huit circonscriptions inter-régionales [1] ont publié mardi 20 mai, sur LeMonde.fr, une tribune titrée : « Un accord de libre-échange, sinon rien. » Ce texte écrit dans l’urgence [2], sans qu’on sache très bien s’il a vraiment été discuté, où, quand, et par qui, est néanmoins intéressant puisqu’il prétend coucher sur le papier la position du PS [3]. Laquelle tient en huit mots : attendre la fin des négociations pour se prononcer.

    Attendre. Le PS refuse « une posture facile et électoraliste », lit-on, et veut prendre son temps pour « évaluer les potentialités d’un accord géostratégique » dont la suite du texte ne cache pas qu’il constitue un projet clef « à l’heure de la compétition des Etats-continents et des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ». Comme « nous n’en sommes qu’au tout début des discussions » et qu’elle vont, prétendent-ils, se prolongerCe n’est pas le souhait de François Hollande qui déclarait, le 11 février, lors d’une conférence de presse à Washington :« Nous avons tout à gagner à aller vite. Sinon, nous savons bien qu’il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de crispations. », les signataires suggèrent de mettre à profit cette « longue période » pour « organiser un débat de fond, démocratique, public et transparent ».

    Se prononcer. Conscients qu’ils ne peuvent pas s’en tenir à cette proposition qui aurait amusé Clémenceau, les signataires listent pour finir six « exigences » qui, juré, craché, devront être respectées :

      • « la non-introduction d’un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats qui permettrait à une entreprise étrangère de contourner les juridictions nationales pour attaquer un pays devant une Cour internationale d’arbitrage si elle estime qu’une loi a lésé ses intérêts. Les multinationales ne doivent pas obtenir plus de garanties que les politiques publiques !
    • la non remise en cause de nos choix de société en matière d’éthique, de droit du travail, de santé et de sécurité alimentaire qui constituent nos « préférences collectives » et fondent le modèle social européen ;
    • la protection des données personnelles ;
    • la préservation des indications géographiques comme les appellations d’origine contrôlée (AOC) ;
    • la protection de la propriété industrielle et intellectuelle ;
    • la préservation de la qualité des services publics. »

    Six exigences assorties d’un serment :

    « Candidats à l’élection européenne du 25 mai prochain, nous prenons un engagement clair et ferme : si l’une de nos exigences n’était pas respectée, nous, socialistes français, prendrons nos responsabilités et rejetterons cet accord. »

    Rien de nouveau depuis Amsterdam et le TCE

    Que vaut cet engagement ? Ce n’est pas la première fois que sur un sujet européen, le PS énonce des « conditions » et des « exigences » pour l’adoption d’un traité ; l’histoire enseigne qu’elles n’étaient que des chiffons de papier.

    Fin 1996, pour couper court au débat sur l’euro qui agite le PS (dans l’opposition), Lionel Jospin adopte une ligne dite « euroréaliste », « oui » à la monnaie unique, « non » à la façon « actuelle » de la faire. Et formule, avec l’aide de Pierre Moscovici, à l’époque secrétaire national aux études, « quatre conditions » au passage à la monnaie unique censées permettre « une réorientation de la construction européenne ». Elles affirmaient notamment la nécessité de créer un gouvernement économique européen en face de la banque centrale, et d’élaborer un « pacte de solidarité et de croissance », qui serait en quelque sorte une correction et un contrepoids « politique » aux critères purement « comptables » du pacte de stabilité. En juin 1997, tout frais élu à Matignon, Lionel Jospin accepte de signer au sommet européen d’Amsterdam le pacte de stabilité, qu’il qualifiait quelques jours plus tôt de « Super Maastricht », contre une vague prise en compte de la croissance. Rien de plus.

    Octobre 2003. Pour tenter de mettre un terme aux divisions apparues au sein du PS sur le projet de constitution européenne élaborée par la Convention présidée par Valéry Giscard d’Estaing, la direction du PS décide d’attendre de connaître les résultats de la Conférence intergouvernementale qui vient de s’ouvrir pour se prononcer. Promet un réforme interne à son issue, et adopte en conseil national « sept exigences » (à relire ici en intégralité) dont la prise en compte déterminera, affirme-t-elle, la position du PS sur le traité constitutionnel européen. Le PS enjambe ainsi les élections européennes de juin 2004 avec ses belles exigences sous le coude. Deux mois après, bien qu’elle n’aient pas été satisfaites, François Hollande et la majeure partie des dirigeants du PS s’engagent pour le « oui ».

    L’histoire bégaie...

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  • Où l'on voit la distance qui sépare au PS les discours des actes, et la façon dont un texte mettant en jeu notre modèle économique et social est co-écrit par les multi-nationales, la Commission et certains députés européens, avec la complicité des gouvernements, et dans le dos des peuples...

    Sur Politis.fr - 15 mai 2014

    L’Assemblée discute le 22 mai d’une résolution sur le grand marché transatlantique UE-USA, présentée par le Front de gauche mais édulcorée en commission par le PS. Le débat, au cœur des élections européennes, s’annonce houleux.

    Les députés français débattront le 22 mai du traité transatlantique en cours de négociation entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis, un sujet majeur des élections européennes dont ils ignorent quasiment tout. Les négociations autour d’un vaste programme de libéralisations menées par Karel De Gucht, commissaire européen au commerce et négociateur en chef, ont lieu dans la plus grande discrétion. De quoi agacer les députés qui n’ont pas leur mot à dire sur la création de ce grand marché transatlantique baptisé Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI, TTIP en anglais). Ils le feront savoir lors de l’examen à l’Assemblée nationale d’une proposition de résolution européenne sur « le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis d’Amérique », déposée par le Front de gauche.

    Caviardage en commission

    Le contenu de la résolution a cependant été modifié par les députés socialistes en commission. Dans le texte initial, les députés du Front de gauche invitaient le gouvernement français « à intervenir auprès de la Commission européenne afin de suspendre les négociations » sur le projet d’accord de libre-échange et demandait d’y associer les Parlements nationaux (lire ci-dessous l’extrait ainsi que l’intégralité de la proposition de résolution européenne). Amendé le 13 mai en commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale, le texte a été édulcoré par le PS, avec le soutien de la droite. Les députés EELV présents étaient, eux, favorables à la résolution initiale du Front de gauche.

    Extrait de la version initiale de la résolution
    Extrait de la version initiale de la résolution

    Les députés socialistes présents, emmenés par Estelle Grelier, « ont supprimé la disposition qui prévoyait la suspension des négociations de l’accord bilatéral qui se mènent dans la plus totale opacité », a réagi André Chassaigne, député Front de gauche et rapporteur du texte. « Ils ont ainsi vidé notre proposition de résolution de sa substance et validé la poursuite des négociations sur un grand marché transatlantique au service du pouvoir financier des multinationales. La démarche des socialistes atteste de leur soutien, de fait, à ces négociations menées contre les peuples. » Le groupe Front de gauche compte présenter des amendements en séance le 22 mai pour rétablir le texte initial.

    André Chassaigne (photo : Michel Soudais)

    La mémoire courte des socialistes

    Surtout, rappelle André Chassaigne, une précédente résolution de députés socialistes déposée en mai 2013 et considérée comme « définitive » par l’Assemblée nationale le 15 juin 2013 demandait notamment « à ce que soit exclu du mandat le recours à un mécanisme spécifique de règlement des différends entre les investisseurs et les États pour préserver le droit souverain des États », ce qui n’est pas le cas dans le mandat de la Commission européenne qui a fuité.

    De plus, les députés socialistes demandaient aussi « à ce que la représentation nationale qui, en fonction du résultat des négociations, sera amenée à se prononcer par son vote sur la ratification de cet accord soit dûment associée au suivi des négociations à travers une information régulière du gouvernement des questions examinées dans le cadre du comité de politique commerciale (CPC) du Conseil de l’Union européenne », ce qui n’est pas le cas.

    Autre sujet de conflit parmi les députés socialistes à l’Assemblée nationale, le fait que le mandat de la Commission reprenne la quasi-intégralité de l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI) dans son article 23. Cet accord négocié secrètement par les vingt-neuf pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) entre 1995 et avril 1997 a été rejeté en 1998 par le gouvernement de Lionel Jospin. « L’accord tel qu’il est conçu actuellement n’est pas réformable », avait alors jugé le Premier ministre socialiste, qui avait proposé « une nouvelle négociation sur des bases totalement nouvelles et dans un cadre associant tous les acteurs ».

    Les normes sociales et environnementales sur la sellette

    Double discours. Cette volonté de poursuivre les négociations apparaît en contradiction avec la campagne du PS pour les élections européennes pour une « Europe qui protège ses travailleurs » et une « Europe du progrès social ». « Tous les accords commerciaux doivent garantir nos intérêts et la spécificité de notre modèle, social, culturel, mais aussi les normes sociales et environnementales », avait déclaré Harlem Désir, alors premier secrétaire, lors d’une conférence de presse destinée à lancer la campagne européenne du PS, le 3 mars dernier.

    Or, la Commission est officiellement chargée « d’aligner les règles et les normes techniques applicables aux produits, qui, à l’heure actuelle, constituent le principal obstacle aux échanges transatlantiques ». Cet objectif de libéralisation tous azimuts met en danger les normes sociales et environnementales, au profit de gains économiques considérables annoncés par la Commission, avec notamment l’élimination des barrières non tarifaires : de 119,2 milliards de dollars pour l’Union européenne et de 94,2 milliards de dollars pour les États-Unis.

    Un enjeu démocratique

    Le débat promet donc d’être explosif à gauche trois jours avant les élections européennes, et alors qu’un cinquième cycle de négociations autour du PTCI entre l’Union européenne et les États-Unis est prévu à Arlington (Virginie) du 19 au 23 mai.

    Les députés aborderont un sujet fort sur le plan démocratique. La résolution du Front de gauche reproche l’absence de « transparence sur ces négociations » qu’il juge « inacceptables sur la forme et sur le fond » :

    « Non seulement elles sont menées de manière totalement opaque par des acteurs illégitimes, mais la logique néolibérale qui les guide ne peut aboutir qu’à une régression de la protection sociale, sanitaire, environnementale due à nos concitoyens. »

    Devant la montée de ces critiques dans la campagne électorale et l’annonce d’un débat le 22 mai autour de la résolution du Front de gauche, Fleur Pellerin, secrétaire d’État au Commerce extérieur, a voulu rassurer et « dédramatiser ». Elle estime que « des lignes rouges ont été tracées » dans le mandat de négociation de la Commission européenne, notamment dans le domaine agroalimentaire : il n’y aura « pas d’OGM, pas de poulet chloré, pas de bœuf aux hormones », a-t-elle assuré, sans dévoiler l’intégralité du mandat de la Commission. Or, celui-ci n’a pas été rendu public : seuls quelques points du mandat européen (pharmacie, textile et cosmétiques) ont été publiés le 14 mai sur le site de la Commission. De plus, le Parlement européen et les Parlements nationaux ignorent les secteurs à libéraliser déjà négociés dans les différents cycles de négociations.

    Fleur Pellerin a ajouté que « la France n’était pas demandeuse » de l’inclusion du très controversé mécanisme de règlement des différends dans le chapitre de la protection des investissements des grandes entreprises. Mais « pour l’Union européenne et les États membres, s’opposer très fermement à la présence de ce type de mécanisme créerait un précédent qui nous mettrait dans une situation délicate dans de futures négociations » si l’UE demande à son tour ce type de clause à des pays émergents ou en développement.

    Un processus ancien et très opaque

    Le gouvernement ne répond pas à la critique montante sur le caractère peu démocratique des négociations autour du grand marché transatlantique. Le « déficit démocratique de ces négociations est renforcé par leur propre objet. Loin de se borner à des questions purement économiques et commerciales, le mandat de négociation permet d’ores et déjà à la Commission européenne de négocier un accord “global”, touchant des domaines stratégiques et vitaux pour l’indépendance des nations et l’autonomie des peuples », relève la résolution du Front de gauche. Et de citer les dizaines de secteurs concernés, comme l’agriculture, la chimie, l’énergie et les matières premières, les marché publics, les services médicaux, les services publics, la pharmacie, etc.

    « L’objectif est de créer une vaste zone de libre-échange en démantelant l’ensemble des règles tarifaires, réglementaires et environnementales qui protègent les salariés et consommateurs européens. La perspective de cet accord fait peser une grave menace sur les règles de santé publique, écologiques, sociales et culturelles en France et en Europe ».

    Le processus très opaque de création d’un grand marché transatlantique remonte à loin, bien avant que les dirigeants européens s’engagent, lors du Conseil européen des 18 et 19 octobre 2012, à lancer des négociations pour un accord de libre-échange « global » sur le commerce et les investissements.

    Le secrétaire d’Etat américain au commerce Ron Kirk le commissaire européen au commerce Karel De Gucht à Washington, le 16 décembre 2010. (Photo : KAREN BLEIER / AFP)

    Un « Groupe de travail de haut niveau sur l’emploi et la croissance » a été créé lors d’une réunion au sommet, le 28 novembre 2011. Présidé par Ron Kirk, représentant des États-Unis pour les questions commerciales, et par Karel De Gucht, commissaire européen au Commerce, ce comité d’experts a été chargé d’identifier « les politiques et les mesures pour accroître le commerce et les investissements transatlantiques », et de travailler « en étroite concertation avec tous les groupes publics et privés intéressés ».

    Les lobbies à la manœuvre

    Loin des représentations démocratiques des pays membres de l’UE, le projet d’accord de libre-échange a été élaboré avec les lobbies liés au monde des multinationales, au sein du Dialogue transatlantique du monde des affaires (Transatlantic Business Dialogue, TABD), partenaire officiel du processus avec un autre lobby des multinationales, l’European American Business Council. Les échanges ont donné lieu à la création du Transatlantic Business Council, une organisation réunissant une soixantaine de multinationales (parmi lesquelles Audi, BP, Coca-Cola, Ernst & Young, IBM, Microsoft, Siemens, Total, etc.). La défense des intérêts des grandes entreprises est donc privilégié dans le rapport final du Groupe de travail de haut niveau sur l’emploi et la croissance publié en février 2013, au point que l’UE et les États-Unis « continuent de partager les mêmes objectifs énoncés » dans ce rapport, peut-on lire dans la déclaration conjointe du sommet UE-États-Unis, qui s’est tenu à Bruxelles en mars.

    Le déficit démocratique autour de telles négociations est aussi flagrant au sein de l’UE, comme le montrent les documents obtenus par Corporate Europe Observatory, en réponse à une demande d’accès aux documents des rencontres que la direction générale du commerce de la Commission a eu avec ses « parties prenantes » dans le cadre du grand marché transatlantique. La Commission a publié une liste de 135 réunions qui se sont tenues entre janvier 2012 et avril 2013, qui concernent les négociations entre l’Union européenne et les États-Unis sur le libre échange. « Au moins 119 impliquaient des rencontres avec des grandes entreprises et leurs groupes de pression. Ce qui signifie que plus de 93 % des rencontres de la Commission avec les parties prenantes pendant les préparations des négociations ont eu lieu avec le monde des affaires ». Cette liste de rencontres démontre qu’en plus des « dialogues pour la société civile » signalés sur le site Internet de la direction générale du commerce, « il existe un monde parallèle fait de nombreuses réunions à huis clos avec les lobbyistes des multinationales ».

    Trois UMP au cœur du projet

    Les relations qu’ont les parlementaires européens avec les lobbies des industriels, source de conflits d’intérêt, sont un autre aspect du déficit démocratique. Nous l’avions abordé dans un entretien avec Bruno Poncelet, spécialiste des accords de libre-échange [1], publié le 30 mai 2013 par politis.fr :

    « Les entreprises multinationales sont au cœur du processus de préparation des négociations, et ce depuis que dans les années 1990 des tentatives de projets d’accord pour un partenariat transatlantique entre les États-Unis et l’UE ont été lancées. Ces initiatives ne viennent pas des politiques mais des multinationales qui sont présentes dans différents lobbies. Les chambres américaines de commerce et le Transatlantic Business Council (TBC), un lobby d’affaires, en font partie. Un troisième est plus inquiétant : le Transatlantic Policy Network (TPN) est constitué pour moitié de firmes multinationales dont Nestlé, AT&T, Hewlett Packard, BASF, Dow Chimical, Bayer, Walt Disney Company, Time Warner, etc.

     

    Des parlementaires européens et des élus du Congrès des États-Unis constituent l’autre moitié du TPN. Les principaux groupes politiques au Parlement européen sont présents : les conservateurs du PPE, les socialistes de S&D et l’ADLE, qui représente une partie de la droite, ainsi que deux eurodéputés Verts. Le seul groupe politique qui n’a aucun de ses membres dans le TPN est la Gauche unitaire européenne (GUE). En tout, 60 députés européens, plus de 8 % du Parlement, sont membres du TPN. Une majorité écrasante sont des élus allemands, des élus du Royaume-Uni et de l’Espagne. La France est en quatrième position avec trois parlementaires de l’UMP : Françoise Grossetête, Joseph Daul et Alain Lamassoure. »

     

    Le débat du 22 mai sera sans doute l’occasion d’un grand déballage public salutaire autour de ces informations absentes de la campagne pour les élections européennes.

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