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    Conférence de presse de Jean-Luc Mélenchon sur le résultat des élections européennes

     

     

    Mardi 27 Mai 2014

    Laurent Mafffeis et Matthias Tavel

      

    Abstention : le 1er parti de France et d’Europe

    Avec 57 % d’abstention en France comme en Eu rope, la majorité des électeurs n’ont pas participé à ces élections européennes. Cette défiance est encore plus forte dans l’électorat populaire : 65 % des ouvriers, 68 % des employés, 69 % des chômeurs se sont abstenus d’après l’étude du vote réalisée par IPSOS.

    Cette défiance est homogène dans toute l’Europe et montre à quel point l’UE est désormais déconnectée du peuple. L’abstention est encore plus massive dans les pays qui ont intégré le plus récemment l’Union européenne. L’abstention atteint ou dépasse ainsi les 70 % en République Tchèque, Pologne, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie, Lettonie et Croatie.

    Résultats en Europe :
    la percée de l’autre gauche méditerranéenne

    A l’image du succès de la CDU d’Angela Merkel, les partis de droite du PPE restent en tête au Parlement européen avec prés du tiers des sièges. Avec les sociaux-démocrates du PSE, la coalition majoritaire sortante conserve 54 % des sièges.

    Pas de sursaut de la social-démocratie
    Loin du succès annoncé par Martin Schulz, les sociaux-démocrates stabilisent leur nombre de députés. Leur rebond en Italie et leur progression en Allemagne masquent en réalité la poursuite d’un spectaculaire déclin dans le reste de l’Europe. Même en Allemagne, leur progression les place largement en dessous des scores historiques moyens des sociaux-démocrates allemands, alors même qu’ils disposaient de la candidature de Martin Schulz comme candidat à la présidence de la Commission. Dans plusieurs pays de l’Est, les sociaux-démocrates s’enfoncent sous les 10 %, notamment en Hongrie et en Pologne, pays qu’ils avaient pourtant dirigé pendant plusieurs années après la chute du mur de Berlin. Et dans les pays scandinaves, bastion de la social-démocratie européenne, ils sont loin de leurs scores historiques avec seulement 19 % par exemple au Danemark.

    Une extrême droite ascendante mais divisée
    Les partis d’extrême droite progressent fortement à l’image du Front National. Pourtant ils sont loin de constituer un "bloc europhobe" de 140 députés qui a été annoncé par la presse comme la principale nouveauté de cette élection. Les deux partis d’extrême drpote en tête en Grande-Bretagne et au Danemark refusent ainsi toute alliance avec le FN de Marine Le Pen. Quant au principal allié de cette dernière, le PVV du néerlandais Geert Wilders, il a réalisé une contre-performance électorale, tout comme son autre allié le Vlams Belang belge. Deux autres partis d’extrême droite en progression, le Jobik hongrois et Aube dorée en Grèce, font aussi bande à part par rapport au Front National. On est donc loin d’un "bloc europhobe" cohérent comme annoncé par les médias.

    La percée de l’autre gauche méditerranéenne
    Alors que les verts reculent de quelques sièges, les partis de l’autre gauche regroupés dans le groupe GUE progressent fortement. Le groupe GUE devrait ainsi voir son nombre d’élus passer de 35 à 53, soit une progression de 50 %, qui lui permet désormais de faire jeu égal dans le Parlement avec les Verts. Cette progression provient principalement des pays méditerranéens où l’autre gauche réalise une percée. Emmenée par Alexis Tsipras la coalition Syriza arrive en tête en Grèce avec 26,5 % (7 élus). L’autre gauche espagnole totalise 18 % entre l’alliance communiste Izquierda Plural (10 %, 6 élus) et le nouveau parti proche du mouvement des Indignés, Podemos (8 %, 5 élus). L’autre gauche remporte aussi 17 % au Portugal. Et elle retrouve aussi une représentation parlementaire européenne en Italie, avec 3 élus de la coalition Autre Europe.

    Laurent MAFFEÏS
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    Résultats en France :
    la crise politique s’approfondit

    Un mode de scrutin injuste…

    Officiellement, les européennes se déroulent à la proportionnelle. Dans les faits, le mode de scrutin en 8 circonscriptions favorise les gros partis. Le PS sauve 13 sièges alors que son score national ne lui donne droit qu’à 10. L’UMP emporte 20 sièges alors que son score ne lui en aurait donné que 15 à la proportionnelle nationale. Le FN tire le jackpot : avec 24,85% des voix, il empoche 32% des sièges soit 24 élus. Dans le Nord-Ouest, la liste de Marine Le Pen empoche même la moitié des sièges (5 sur 10) avec moins d’un tiers des suffrages.
    A l’inverse le FDG aurait eu un élu supplémentaire à la proportionnelle nationale. Surtout, le seuil pour participer à la distribution des sièges est officiellement de 5%. Mais le FDG n’obtient que 4 élus alors qu’il le franchit dans les 8 circonscriptions du pays.

    Le FN en tête
    Le Front National arrive en tête d’une élection nationale pour la première fois de son histoire. Avec 4,7 millions de voix, il obtient 24,85% des suffrages. Son score est homogène. Le FN dépasse les 10% des exprimés dans tous les départements sauf Paris, Mayotte, la Martinique et la Guadeloupe. Il arrive premier dans 5 des 8 circonscriptions (Nord-Ouest, Est, Sud-Est, Sud-Ouest, Centre) et 71 départements. Seuls l’Ouest et l’Ile-de-France, zones traditionnellement plus faible, placent l’UMP en tête, le FN plafonnant sous les 20% des exprimés.
    Avec 4,7 millions de voix, le FN ne retrouve cependant pas les 6,4 millions de voix de Marine Le Pen à la présidentielle de 2012. Mais il dépasse d’un million son nombre de voix des législatives 2012 (1er tour), dernière élection nationale, alors que la participation y était nettement plus forte. Par rapport aux élections européennes de 2009 où la participation était équivalente, le FN multiplie son nombre de voix par plus de 4 (il obtenait 1,1 millions de voix).
    D’où viennent ces voix ? Seule une analyse bureau de vote par bureau de vote permettrait de le savoir avec exactitude. Mais de toute évidence, le score du FN s’explique principalement par une plus grande mobilisation de son électorat et plus modestement par un jeu de vase communicant avec la droite « classique ». Aux européennes de 2009, le total des listes de droite et extrême-droite cumulait 8,6 millions d’électeurs. Cette année, il atteint 11,7 millions, trois millions de plus, uniquement tiré par le FN. Les listes de droite « classique » reculent de 450 000 voix. Le total, 3,5 millions, correspond exactement aux progrès du FN.

    Crise à droite
    Le FN est-il en train de prendre la tête de l’opposition de droite à François Hollande ? La question mérite d’être posée. Car l’UMP ne réussi pas à remplir ce rôle. Avec 3,9 millions de voix, l’UMP retrouve à peine la moitié des voix de la majorité sarkozyste sortante aux législatives de 2012 (8 millions). Elle obtient même 860 000 voix de moins qu’aux européennes de 2009. La tribune de Nicolas Sarkozy publiée à trois jours du scrutin n’aura pas mobilisé.
    La défection du centre-droit (l’UDI de Jean-Louis Borloo se présentait cette année avec le Modem alors que ses composantes participaient aux listes UMP en 2009 et 2012) ne suffit pas à expliquer ce recul de l’UMP. Le total des voix centristes, UMP et divers droite est en recul par rapport aux législatives de 2012 (-2,5 millions) comme par rapport aux européennes de 2009 (-500 000 voix). Une part non négligeable des électeurs du centre-droit et de la droite a donc préféré s’abstenir ou voter FN.
    C’est particulièrement visible dans certaines circonscriptions comme le Sud-Ouest. Avec 8,6% des voix, le candidat UDI-Modem Robert Rochefort obtient un score identique à celui de 2009 (8,61%) alors que la liste UMP s’effondre, passant de 26,7% en 2009 à 18,5% seulement. Même dans l’Ouest où l’UMP reste devant le FN, le parti de Jean-François Copé passe de 27,2% à 19,6%. La liste UDI-Modem ne récupère que la moitié des pertes.

    Le PS à son plus bas historique
    L’UMP ne profite pas de la démobilisation des électeurs de gauche. Le PS est pourtant frappé très violemment. Après la bérézina des municipales, il essuie une deuxième déroute. Avec 13,98% des suffrages exprimés, le PS réalise son pire score à une élection nationale depuis 1965. Il fait pire qu’aux législatives de 1993, pire qu’à la présidentielle de 2002, et même pire que Michel Rocard aux européennes en 1994 (14,3%).
    Le PS obtient à peine 2,6 millions de voix. C’est 200 000 voix de moins qu’en 2009. Surtout, le PS est le parti qui perd le plus d’électeurs par rapport aux élections législatives de 2012. Il perd 5,4 millions de voix. Le PS perd 67% de ses voix des législatives quand la participation ne recule que de 25% ! Après les élections municipales, le nouveau Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis jugeait que « les électeurs de gauche nous ont fait la grève ». C’est manifestement une grève reconductible.
    Combinée à la sortie d’Europe Ecologie du gouvernement, c’est l’assise sociale de la majorité gouvernementale qui est réduite à un niveau jamais atteint. Les quatre dernières élections européennes ont toutes été organisées deux ans après l’élection d’une nouvelle majorité parlementaire. La comparaison est donc facile. Elle est édifiante pour François Hollande. En 1999, deux ans après sa victoire de 1997, la gauche plurielle totalisait encore 38% des voix. En 2004, deux ans après la réélection de Jacques Chirac, la majorité gouvernementale UMP-UDF rassemblait encore 29%. En 2009, deux ans après la victoire de Nicolas Sarkozy, l’UMP atteignait 28%. Cette année, seuls les listes du PS-PRG soutenaient le gouvernement. Elle recueillent donc 13,98% ! Manuel Valls n’a pas de base sociale dans le pays.

    Le PS emporte (presque) tout dans sa chute
    Le PS emporte presque toute la gauche dans chute. Le total des partis de gauche et d’extrême gauche est terriblement bas. En 2009, ce « total gauche » dépassait les 45%. En 2012, aux législatives, il flirtait avec les 48%. Cette année, il atteint péniblement les 34% ! La politique de François Hollande met en danger tout le monde à gauche, même ceux qui la combattent ou la critiquent ! Sa sortie du gouvernement a permis à Europe Ecologie de retrouver ses électeurs des législatives de 2012 (1,7 million de voix contre 1,4 million en 2012). Mais cela n’a pas empêche l’effondrement par rapport aux européennes de 2009 : le parti perd 40% de ses voix soit plus d’un million de suffrages. Même chose pour les listes d’extrême gauche (NPA, LO). Elles améliorent leur score des législatives 2012 mais s’effondrent par rapport à 2009. C’est particulièrement vrai du NPA qui récoltait 4,88% des voix et ne dépasse pas 1% cette fois-ci.

    Front de Gauche : entre résistance et ressac
    Dans ce contexte, le Front de Gauche résiste. Il est la seule force de gauche à gagner quelques voix par rapport aux européennes de 2009. Avec 1,25 million de voix, il obtient 6,61%. C’est un peu mieux qu’en 2009 où le FDG totalisait 1,1 million de voix et 6,48%. Contrairement à 2009, le FDG franchit la barre des 5% dans toutes les circonscriptions. Dans les 7 circonscriptions métropolitaines, le FDG progresse en voix par rapport à 2009. Les gains sont plus forts dans l’Est (+ 42 000 voix pour Gabriel Amard) et dans le Sud Ouest (+38 000 voix pour Jean-Luc Mélenchon). Dans les 7 circonscriptions, le FDG recule en voix par rapport aux législatives de 2012. Les pertes sont plus lourdes dans le Nord Ouest, l’Ile-de-France et le Sud-Est où elles dépassent 100 000 voix.
    La résistance nationale ne masque pas un score décevant. Le recul en voix du par rapport aux législatives de 2012 est plus important que la baisse de participation. (-33% des voix pour -25% de participation). Cette tendance est confirmée par le sondage IPSOS « comprendre le vote des Français » réalisé à la veille du vote. Il indique qu’environ un quart des électeurs de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle a de nouveau voté pour le Front de Gauche, un quart s’est porté sur d’autres listes de gauche (EELV, Nouvelle Donne…) et la moitié s’est abstenu.
    Dans le détail, Jean-Luc Mélenchon dans le Sud-Ouest, Gabriel Amard dans l’Est et Myriam Martin dans l’Ouest améliorent le score du FDG par rapport à 2009 mais aussi par rapport aux législatives de 2012. Gabriel Amard est celui qui progresse le plus par rapport à 2009 (+1,35 point). Jean-Luc Mélenchon est celui qui progresse le plus par rapport aux législatives 2012 (+0.73 point). Comme en 2009, Jean-Luc Mélenchon obtient le meilleur score du FDG avec 8,6% dans le Sud Ouest, améliorant son résultat de 2009. Il progresse en voix dans la totalité des 18 départements de la circonscription.

    Dans des terres à forte influence communiste, Corinne Morel Darleux et Jacky Hénin voient leur score reculer par rapport à 2009 et 2012 en pourcentage. Corinne Morel Darleux améliore cependant le score par rapport à 2009 dans certains départements comme le Puy-de-Dôme (+ 2 000 voix et + 0,33 point). Le recul le plus important concerne le Nord-Ouest où Jacky Hénin n’est pas réélu. Il est le seul député sortant FDG dans ce cas. Marie-Christine Vergiat dans le Sud-Est, Patrick Le Hyaric en Île-de-France, Younous Omarjee outre-mer et Jean-Luc Mélenchon sont réélus.

    Matthias TAVEL

     

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  • Sur le blog Mediapart d'Eric Fassin

    Pourquoi la droitisation du gouvernement socialiste n’ouvre-t-elle pas à un espace pour la gauche de gauche ? Pourquoi cette dérive bénéficie-t-elle seulement au Front national ?

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    Dimanche 25 mai, à l’heure des résultats, Marine Le Pen prend la parole pour les télévisions. Le plus important n’est pas ce qu’elle dit – mais ce qu’elle donne à voir : derrière elle, des affiches célèbrent « le premier parti de France ». Les imprimer sans attendre les résultats signifie ce que chacun savait : tout était déjà joué. Pire : les sondages qui annonçaient cette victoire, loin de l’atténuer en provoquant un sursaut, ont encouragé les électeurs à creuser l’écart avec l’UMP, et davantage encore le PS. Le succès va au succès. Mais il y a plus : c’est le visage de Marianne qui apparaît (en blanc) au centre de l’affiche : le Front national s’affirme républicain. Et de fait, il l’est, à en croire beaucoup d’analystes, puisqu’il est légal – comme si tout ce qui n’est pas interdit était légitime ! En 2017, au moment où le Front national rejoindra un gouvernement de droite, on nous expliquera sans doute qu’il s’agit d’opposer un front républicain à l’extrême droite moins présentable qui va de Robert Ménard à Alain Soral. C’est en tout cas le scénario que j’ai proposé pour conclure mon essai paru après les municipales : Gauche, l’avenir d’une désillusion.

    Le PS imite l’UMP, qui imite le FN

    Si le résultat était prévisible, et de longue date, ce n’est pas tant du fait des sondages, dont on sait les limites, qu’en raison d’une logique implacable : la droitisation de l’ensemble du paysage politique est la condition de possibilité de la « dédiabolisation » réussie par Marine Le Pen. Le PS imite l’UMP, qui imite le FN ; et Jean-Marie Le Pen le répète depuis longtemps, les électeurs préfèrent l’original à la copie. La mécanique est donc inexorable. En choisissant le parti des patrons et des marchés, le gouvernement socialiste se veut réaliste. Cela revient d’une part à valider la croyance que la réalité serait de droite ; et d’autre part, la réalité dément ce « réalisme » supposé : les politiques d’austérité sont désastreuses, non pas seulement en termes sociaux, mais aussi économiques. Il ne faut donc pas s’étonner si la catastrophe est également politique : le FN dénonce l’UMPS – et en menant la même politique que Nicolas Sarkozy, François Hollande s’emploie à lui donner raison.

    Pourquoi la gauche de gauche ne progresse-t-elle pas ?

    Reste une question fondamentale : pourquoi la droitisation n’ouvre-t-elle pas à un espace pour la gauche de gauche ? Pourquoi cette dérive bénéficie-t-elle seulement au Front national, et pas au Front de gauche, ni au NPA, ni à toute autre formation à la gauche du Parti socialiste ? Même les résultats de Nouvelle Donne semblent bien modestes en regard des espérances de ses initiateurs… On peut faire l’hypothèse que l’hégémonie idéologique de la droite ne vient pas seulement des politiques économiques, mais aussi des politiques identitaires qui les accompagnent, comme pour les compenser ou du moins en distraire. On l’a vu en 2005, après le référendum sur le Traité constitutionnel européen, avec la lutte contre l’immigration subie, puis durant l’été 2012, avec la nouvelle chasse aux Roms qui a détourné l’attention de l’adoption du Traité de stabilité : la xénophobie d’État serait-elle le remède politique offert aux citoyens contre les maux du néolibéralisme ?

    En matière d’immigration, sous François Hollande, le verbe est moins haut que sous Nicolas Sarkozy ; mais les chiffres d’expulsions ne baissent pas. Autrement dit, le PS s’accorde avec l’UMP pour considérer que l’immigration est un problème. Quant aux populations roms, et le discours et l’action se sont aggravés sous l’impulsion de Manuel Valls : le Premier ministre est d’ailleurs cité à comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris, le 5 juin, pour provocation à la discrimination et à la haine raciales : ne prétend-il pas assigner une « vocation » aux Roms, excluant ainsi une population européenne définie par un critère racial ? Or, comme la xénophobie d’État sous Nicolas Sarkozy, la politique de la race menée sous la responsabilité de François Hollande vient légitimer le discours de l’extrême droite : du PS au FN, en passant par l’UMP, c’est un même discours qui s’est imposé. L’hégémonie économique de la droite s’accompagne ainsi d’une hégémonie identitaire de l’extrême droite. Aussi la gauche de gauche ne parvient-elle pas à occuper l’espace que semblerait ouvrir la dérive droitière du PS. Sans doute les électeurs ne se jettent-ils pas forcément dans les bras de l’extrême droite : beaucoup, surtout à gauche, choisissent l’abstention – soit l’autre face du délitement démocratique.

    Le Titanic PS

    Que faire ? Bien sûr, il serait logique d’en conclure que le PS doit changer de politique. Si la droitisation échoue dans les urnes, pourquoi pas un coup de barre à gauche ? Mais, on le sait désormais, en France, on ne change pas une équipe qui perd : François Hollande avait entendu la colère des Français, après les élections municipales, et il a nommé Manuel Valls à Matignon. Soit la même chose, mais plus vite et plus fort. Et après le « séisme » des élections européennes, le Premier ministre confirme qu’il va continuer… mais plus vite et plus fort. Pendant longtemps, on a cru que le Parti socialiste pouvait s’accommoder de tous les renoncements à condition de garder le contrôle des pouvoirs locaux et régionaux. Désormais, il semble voué à perdre les régions après les villes, mais il ne change pas de cap pour autant.

    On voudrait croire que la révolte gronde chez ceux qu’on appelle « les élus de terrain » – mais à ce jour, ils se contentent de grommeler. C’est sans doute qu’ils sont dans la même position que, dans la sphère économique, des employés redoutant la prochaine vague de licenciements : à défaut d’infléchir la politique de l’entreprise, à titre personnel, ils espèrent y échapper. Mieux vaut donc éviter de faire trop de bruit. Les stratégies individuelles contribuent de la sorte à façonner une stratégie collective dont, sinon, on aurait du mal à comprendre l’irrationalité : c’est pour sauver sa peau qu’on court avec les camarades vers l’abîme… Ainsi beaucoup choisissent-ils de couler avec le navire, non pas tant par esprit de sacrifice, mais surtout à défaut d’avoir des projets alternatifs. Car telle pourrait bien être la clé de l’aveuglement socialiste : pour ce parti, il n’existe jamais de plan B.

    L’exemple grec

    Dans ce contexte, le vote de la Grèce donne à penser, et peut-être à espérer – et pas seulement en raison du succès de Syriza, qui fait rêver le Front de gauche : c’est l’ensemble du paysage politique grec qui doit nourrir la réflexion politique en France. En effet, dans le même temps, les socialistes du Pasok continuent de sombrer. Sans doute Nouvelle Démocratie n’est-elle pas très loin derrière Syriza – mais c’est dire qu’on retrouve un affrontement classique entre droite et gauche. Conséquence de ce clivage, pour ou contre les politiques d’austérité ? L’extrême droite, avec Aube dorée, pèse à peine plus lourd que… le Pasok. Certes, c’est beaucoup pour un parti néonazi ; mais c’est près de trois fois moins que le FN en France. L’alternative politique redonne de la vigueur aux logiques démocratiques : l’abstention est plus basse en Grèce qu’en France (de 13 points !).

    Le drame de la France, ce n’est donc pas que le PS soit trop bas ; c’est plutôt qu’il soit trop haut. Il continue de peser comme un poids mort (14%), alors que les Grecs semblent soulagés du fardeau de son homologue (8%). La France est un peu comme le Royaume-Uni : le triomphe de l’extrême droite, avec l’UKIP, s’y accompagne d’un taux d’abstention plus élevé encore (de 8 points) – sans que les travaillistes s’effondrent, il est vrai (à la différence des socialistes français, ils ne sont pas au pouvoir). Des deux côtés de la Manche, à défaut de proposer une autre politique, le socialisme de gouvernement fait obstacle à la logique démocratique en reprenant à son compte le mantra de Margaret Thatcher : « Il n’y a pas d’alternative ». Seul Bernard-Henri Lévy peut croire qu’un gouvernement d’union nationale ferait obstacle à l’extrême droite : en réalité, ce serait valider les attaques du FN contre la collusion de l’UMP et du PS. La démocratie suppose le choix, et non le consensus.

    Se débarrasser du PS

    À défaut de pouvoir changer le PS, peut-être faut-il se résigner à en changer, soit le remplacer, « à la grecque ». « Rompre avec la majorité présidentielle, ou s’abîmer avec elle », écrivait Michel Feher sur Mediapart, le 25 octobre 2013: « Le choix, c’est maintenant »! Mais peut-être n’avons-nous plus le choix aujourd’hui. François Mitterrand avait liquidé le Parti communiste ; peut-être François Hollande va-t-il faire de même avec le Parti socialiste. L’espoir n’est donc plus que l’ancien « premier parti de France » le redevienne enfin, en remontant la pente, mais qu’il finisse de s’effondrer, pour laisser enfin place à d’autres discours – soit à des politiques alternatives. Avant de reconstruire la gauche, il faut donc déblayer les ruines. On songe à la pièce de Ionesco (et ce n’est pas un hasard si l’auteur de Rhinocéros, et son théâtre de l’absurde, résonnent avec notre actualité) : « Amédée, ou comment s’en débarrasser ». Le couple se déchire, et semble voué à l’impuissance ; c’est que la maison est encombrée d’un cadavre qui devient d’autant plus volumineux à mesure qu’on s’en accommode. Ne faut-il pas s’en débarrasser, avant qu’il ne soit trop tard ? La seule question qui vaille est alors : comment ?

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    Ce billet, prolongeant mon essai Gauche : l'avenir d'une désillusion qui vient de paraître dans la collection « Petite Encyclopédie Critique » des éditions Textuel, co-dirigée par Philippe Corcuff et Lilian Mathieu, a d'abord été publié dans ce cadre le 28 mai 2014. L'essai a été présenté sur Mediapart : « Quelques pistes pour sortir du champ de ruines socialistes », un chapitre du livre d’Éric Fassin introduit par François Bonnet, 7 mai 2014

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  • Où l'on voit que les riches s'enrichissent, les pauvres s'appauvrissent, que les seconds se taisent quand on n'entend que les plaintes des premiers qui prétendent être "assommés fiscalement" alors que les hausses d'impôts de 2011 à 2013 ne représentent qu'une faible partie des larges baisses qui leur ont été accordées durant les 10 années précédentes, et bien d'autres choses encore qui déconstruisent le discours dominant ressassé par les perroquets médiatiques, et repris par ce gouvernement qui ne sait plus à quel saint libéral se vouer...

     

      
      
      
      
      
      
      
      
      
      
      
      
    Par Louis Maurin

    Depuis 2008, le niveau de vie des plus démunis diminue. Une crise qui alimente les tensions sociales, mais n’inquiète pas plus que ça les couches favorisées, dont les revenus continuent à augmenter. Par Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.

    + 1 800 euros annuels pour les 10 % les plus riches, - 400 euros pour les 10 % les plus pauvres. Le bilan de l’évolution des revenus sur la période 2008-2011 [1] est sombre pour les milieux populaires. La « baisse généralisée du pouvoir d’achat » [2], tant médiatisée, est une imposture : le pouvoir d’achat augmente pour les plus riches et diminue pour les plus pauvres.

    Bien des catégories sont à l’abri de la crise. Elle ne frappe qu’une partie de la population : les plus modestes, déjà fragilisés par des décennies de chômage. Les jeunes, les ouvriers et les employés, la main d’œuvre peu qualifiée travaillant dans les petites entreprises du secteur privé et les immigrés sont en première ligne. Et pourtant, on entend essentiellement le bruit des couches aisées qui continuent d’oser se plaindre d’être matraquées par les impôts. Le gouvernement, dont l’action est formatée par les sondages, a entendu le « ras-le-bol-fiscal ». Il a perdu le sens de la réalité sociale. Les politiques mises en œuvre sont totalement décalées par rapport à la hauteur de l’enjeu.

    Trois France se distinguent. Parmi les 30 % les plus riches, les revenus ont continué à progresser entre 2008 et 2011 : + 500 euros gagnés par an pour ceux de la tranche située entre les 70 et les 80 % les plus aisés, jusqu’à + 1 800 euros pour ceux des 10 % supérieurs. La crise, les 20 % du haut ne la connaissent pas vraiment. Entre 2008 et 2009 les cours de la bourse ont été divisés par deux, mais le rattrapage a été rapide. A ce niveau de vie (au moins 2 200 euros par mois pour une personne seule), on vit bien et surtout on continue à gagner plus, même si on est loin des sommets. Mais il est vrai que les gains demeurent beaucoup plus faibles que ceux qu’on observe chez les 0,1 % les plus riches, qui ont gagné (au minimum) 36 000 euros (avant impôts) de plus en 2010 qu’en 2004 (lire notre article Comment évoluent les très hauts revenus en France).

    Les trois dixièmes de la population situés entre les 40 % les plus pauvres et les 30 % les plus riches ont vu leur situation stagner. Les classes moyennes ne sont pas « étranglées », selon l’adage médiatique, leur situation n’est pas la plus difficile, mais cette stagnation constitue une rupture pour des catégories au cœur d’une société où l’on consomme toujours plus. Pour cela, il faut gagner davantage et ce n’est plus le cas. Enfin, parmi les 40 % du bas de la hiérarchie sociale, les revenus diminuent de 300 à 400 euros (données annuelles). Cette France qui décroche a un visage : c’est celle des employés et des ouvriers, qui ont perdu respectivement 500 et 230 euros sur l’année entre 2008 et 2011, quand les cadres ont gagné 1 000 euros, soit un mois de travail d’un Smicard.

    Le visage de la France qui décroche à l’école

    A l’école, la moitié des décrocheurs ont un père ouvrier, 5 % un père cadre. 54 % des enfants en retard en troisième ont des parents non diplômés, 14 % ont des parents diplômés du supérieur. La France qui ne suit pas le rythme du système scolaire est dans son immense majorité issue des catégories défavorisées. L’intérêt porté aux filières prestigieuses fait oublier son image inverse : les moins renommées qui rassemblent les enfants issus pour l’essentiel des catégories populaires. Dans les filières pour les élèves les plus en difficulté au collège, les Sections d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa), on trouve 84 % d’enfants issus des milieux populaires (ouvriers, employés, sans profession) et moins de 2 % d’enfants de cadres. Le constat d’un système scolaire reproduisant les inégalités sociales est désormais partagé. Les données de l’enquête internationale Pisa de l’OCDE [3] – auprès des élèves âgés de 15 ans - ont été largement diffusées, parfois jusqu’à l’excès. Mais l’hypocrisie règne : derrière les discours de justice, aucune mesure n’est mise en œuvre pour réformer l’école sur le fond, dans sa structure, ses programmes et sa pédagogie.

    Un changement social inédit

    Ce décrochage de la France d’en bas est inédit. Jusqu’au milieu des années 2000, les inégalités s’accroissaient par le haut, tirées par la progression des revenus des plus aisés. Pas uniquement des très riches, mais de toute la frange des 10 % les plus aisés. Les moins favorisés continuaient à voir leurs revenus augmenter, notamment au début des années 2000 du fait de l’importante hausse du Smic liée au passage aux 35 heures.« Après tout », nous expliquait-on, « peu importent les inégalités si les plus démunis continuent à récupérer les miettes du progrès ». L’argument ne tient plus quand une part de la population décroche. Et encore, la réalité de 2014 est plus dégradée mais elle n’est pas encore visible dans les statistiques de l’Insee, connues avec deux années de retard. Depuis 2011, tout porte à croire que les plus pauvres se sont encore appauvris et les plus riches enrichis.

    La hausse du chômage est à l’origine de ce basculement. A la mi-2008, on comptait trois millions de chômeurs inscrits à Pôle emploi [4]. Ils sont désormais 4,9 millions, une augmentation de 63 %. Il faut remonter à la fin des années 1970 et au début des années 1980 pour trouver une telle progression. Parmi eux, on trouve 5,5 % de cadres, 6,6 % d’agents de maîtrise et techniciens et 88 % d’ouvriers ou d’employés. En matière d’emploi, il existe une fracture dans la fracture, masquée par les moyennes, et qui ne date pas de 2008. A l’intérieur de l’ensemble du monde ouvrier, les moins qualifiés sont beaucoup plus fragilisés que le reste des actifs. Dès le milieu des années 1990, leur taux de chômage a atteint 17 %. Revenu à 13 % en 2001, il a ensuite grimpé et dépassé 20 % en 2012. Le statut de l’emploi et le type d’employeur comptent de plus en plus. Une partie importante des salariés est à l’abri, soit du fait de leur statut de fonctionnaire (environ 4,5 millions de personnes), soit du fait de leur haut niveau de diplôme qui leur assure de retrouver du travail dans de brefs délais pour l’immense majorité des cas. La taille et le secteur d’activité constituent aussi un clivage majeur : l’avenir d’un salarié d’une grande banque privée a peu à voir avec celui qui est employé dans une PME industrielle.

    La France qui trinque est d’abord celle qui n’a pas eu la chance d’être estampillée bonne élève par le système éducatif (voir encadré sur le décrochage). Même si quelques diplômés ont du mal à s’insérer rapidement, les jeunes en difficulté sont massivement ceux qui n’ont pas eu la chance de faire des études. Le taux de chômage des sans diplôme est passé de 12,6 à 17,1 % entre 2008 et 2012, celui de ceux qui disposent d’un diplôme supérieur à bac + 2 de 4,7 à 5,6 %. Et encore, ces données ne prennent pas en compte les décrocheurs de l’emploi, notamment des femmes peu qualifiées, qui, devant la dégradation des conditions d’emploi (précarité et bas salaires), ne postulent même plus. Dans un pays où la croyance dans les titres scolaires est démesurée, le clivage social le plus profond porte sur le diplôme. Même périmé après des années de travail, il marque ensuite le parcours des salariés tout au long de leur vie professionnelle.

    Le chômage frappe les jeunes et fragilise les plus âgés

    Les plus jeunes sont aux premières loges de la crise. Le taux de chômage des moins de 25 ans a atteint un niveau record de 25,4 % fin 2012 et se situe à 22,8 % fin 2013. Il était de 17 % en 2008. Le nombre de chômeurs de plus de 50 ans reste faible, mais il a doublé entre 2008 et 2013 et leur taux de chômage est passé de 4 à 6,4 %. Si l’on observe le taux, le manque d’emploi pénalise bien plus les jeunes que les plus âgés. Mais ce taux peut être un indicateur trompeur : il faut aussi tenir compte de la durée de chômage [5]. Pour les plus âgés, retrouver un emploi est souvent plus difficile. Le licenciement peut déboucher sur une très forte baisse de niveau de vie, et parfois une fin de carrière prématurée.

    Qui s’inquiète de cette fracture ?

    Durant des années, on a expliqué aux Français que le pays n’était plus composé que d’une vaste classe moyenne. La plupart des sociologues nous expliquait que les catégories sociales ne servaient à rien pour comprendre la société, que nous n’avions plus que des individus agglomérés [6]. L’amplification de la crise de l’emploi ne fait que dévoiler la fonction de ce discours : effacer le poids du social, des hiérarchies et des rapports de domination. Si tout le monde est frappé, personne ne l’est en particulier. Personne ne peut être mis à contribution. Faire comme si la crise touchait tous les milieux est une façon d’exonérer les couches aisées d’une solidarité nécessaire ou de la reporter sur une minorité d’ultra-riches.

    Qui s’inquiète vraiment de cette fracture ? La France qui va mal est populaire et celle dont on entend la plainte est aisée. Elle croule sous l’« assommoir fiscal », paraît-il. En réalité, les impôts ont augmenté entre 2011 et 2013, dans une proportion très inférieure à la baisse enregistrée entre 2000 et 2010 [7].

    L’opération de construction du ras-le-bol fiscal a réussi au-delà des espérances de ses promoteurs. La démagogie des baisses d’impôts n’a pas attendu longtemps avant de faire son retour, faisant passer au second plan la réponse aux besoins sociaux [8].

    Toute une partie des catégories favorisées s’intéresse aux « questions sociétales » comme on dit, au « social business » ou aux sympathiques chartes de la diversité. Cela ne mange pas de pain. Elle se préoccupe de l’orientation de ses enfants, de ses futurs congés ou de son alimentation bio, plus que de la situation des immigrés, des ouvriers qui travaillent à la chaîne, des caissières, ou du fonctionnement de l’entreprise ou de l’école. Reste à attendre le moment où la contestation sera telle que ces milieux se sentiront vraiment contraints de redistribuer, un peu, les cartes.

    La France appauvrie n’est pas périurbaine

    La France qui subit le plus lourdement les effets de la crise est bien loin d’être la France pavillonnaire du périurbain. La pauvreté et les inégalités se concentrent dans les grandes villes. Le taux de pauvreté [9] atteint son maximum – 18% - dans les villes de 100 000 à 200 000 habitants. Dans les communes des banlieues défavorisées ou les quartiers populaires des grandes villes, le taux de pauvreté dépasse souvent les 40 %. Les quartiers les plus en difficulté – parfois présentés comme bénéficiaires du dynamisme des métropoles – ne sont pas des ghettos à l’abandon, mais paient un tribut beaucoup plus lourd à la crise que la campagne ou la France pavillonnaire. Le taux de pauvreté y atteint 36 %, trois fois plus que le reste du territoire urbain. Entre 2006 et 2011, ce taux a augmenté de 6 points, contre 0,8 hors des zones urbaines sensibles.

    Louis Maurin,
    directeur de l’Observatoire des inégalités.
    Auteur de « Déchiffrer la société », éditions La découverte, 2009.

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  • Extrait du rapport du « Collectif pour un audit citoyen de la dette publique », publié le mardi27 mai 2014

      

    59% de la dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêt excessifs

     

    Tout se passe comme si la réduction des déficits et des dettes publiques était aujourd’hui l’objectif prioritaire de la politique économique menée en France comme dans la plupart des pays européens. La baisse des salaires des fonctionnaires, ou le pacte dit « de responsabilité » qui prévoit 50 milliards supplémentaires de réduction des dépenses publiques, sont justifiés au nom de cet impératif.

     

    Le discours dominant sur la montée de la dette publique fait comme si son origine était évidente: une croissance excessive des dépenses publiques.

     

    Mais ce discours ne résiste pas à l’examen des faits. Dans ce rapport nous montrons que l’augmentation de la dette de l’État – qui représente l’essentiel, soit 79%, de la dette publique – ne peut s’expliquer par l’augmentation des dépenses puisque leur part dans le PIB a chuté de 2 points en trente ans.

     

    Si la dette a augmenté c’est d’abord parce que tout au long de ces années l’État s’est systématiquement privé de recettes en exonérant les ménages aisés et les grandes entreprises : du fait de la multiplication des cadeaux fiscaux et des niches, la part des recettes de l’État dans le PIB a chuté de 5 points en 30 ans.

     

    Si l’État, au lieu de se dépouiller lui-même, avait maintenu constante la part de ses recettes dans le PIB, la dette publique serait aujourd’hui inférieure de 24 points de PIB (soit 488 milliards €) à son niveau actuel.

     

    C’est ensuite parce que les taux d’intérêt ont souvent atteint des niveaux excessifs, notamment dans les années 1990 avec les politiques de « franc fort » pour préparer l’entrée dans l’euro, engendrant un « effet boule de neige » qui pèse encore très lourdement sur la dette actuelle.

     

    Si l’État, au lieu de se financer depuis 30 ans sur les marchés financiers, avait recouru à des emprunts directement auprès des ménages ou des banques à un taux d’intérêt réel de 2 %, la dette publique serait aujourd’hui inférieure de 29 points de PIB (soit 589 milliards €) à son niveau actuel.

     

    L’impact combiné de l’effet boule de neige et des cadeaux fiscaux sur la dette publique est majeur : 53% du PIB (soit 1077 milliards €). Si l’État n’avait pas réduit ses recettes et choyé les marchés financiers, le ratio dette publique sur PIB aurait été en 2012 de 43% au lieu de 90 % comme le montre le graphique ci-contre.

     

    Au total, 59% de l’actuelle dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêts excessifs.

     

    La hausse de la dette publique provient pour l’essentiel

    des cadeaux fiscaux et des hauts taux d’intérêt

    Source : Insee, comptabilité nationale ; calculs CAC

     

    Le rapport d’audit propose aussi une évaluation des impacts des paradis fiscaux ainsi que de la crise financière de 2008 dans l’envolée de la dette publique.

     

    Au total, il apparaît clairement que la dette publique a été provoquée par des politiques économiques largement favorables aux intérêts des créanciers et des riches, alors que les sacrifices demandés aujourd’hui pour la réduire pèsent pour l’essentiel sur les salariés, les retraités et les usagers des services publics. Cela pose la question de sa légitimité.

     

    Le rapport se conclut par une série de propositions destinées à alléger le fardeau de la dette (près de 50 milliards d’euros d’intérêts par an et plus de 100 milliards de remboursements) pour rompre avec le cercle vicieux des politiques d’austérité et financer les investissements publics dont l’urgence sociale et écologique n’est plus à démontrer.

     

    La réalisation d’un audit de la dette publique effectué par les citoyens ou sous contrôle citoyen, devrait permettre d'ouvrir enfin un véritable débat démocratique sur la dette publique. Ce débat devrait amener à déterminer quelle partie de cette dette est jugée par les citoyens comme illégitime. Les premières évaluations ici proposées par le groupe de travail du Collectif pour un audit citoyen se veulent une contribution à ce débat.

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  • Communiqué du Parti de gauche

    Vendredi 23 Mai 2014

    François Cocq, secrétaire général du Parti de Gauche

    Jeudi 22 mai, à l’Assemblée nationale, les masques sont tombés. Le groupe socialiste et le gouvernement ont fait le choix d’adopter une coquille vide en guise de résolution européenne sur le projet d’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et les Etats-Unis.

    Ce texte adopté est une forfaiture. Détournant l’initiative des parlementaires Front de Gauche, les socialistes ont vidé le texte initial de tout contenu contraignant.

    Exit la suspension des négociations, dehors la suppression des tribunaux d’arbitrages entre états et investisseurs, la ministre Fleur Pellerin reconnaissant pourtant en séance que ce sont des « mécanismes qui servent à protéger les entreprises ». Quant à la ratification du traité par le Parlement français, la ministre s’est contentée de faire inscrire qu’il s’agit d’un accord mixte pour ne pas avoir à écrire noir sur blanc que le Parlement national devrait se prononcer en dernier ressort !

    Le gouvernement et les siens sont des faussaires. Ils couvrent leur soumission à l’Union Européenne et au règne du marché roi par des salmigondis de surface pour tromper le peuple qui est appelé aux urnes.

    Et pendant qu’ils dépouillent le peuple de sa souveraineté, le FN fait le guet. Marion Maréchal Le Pen, en sentinelle du système, s’est ainsi abstenue au moment du vote.

    Pour faire barrage au projet d’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, dimanche 25, un seul vote : le vote Front de Gauche

     

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